Délégué Médical: Un métier difficile, mais valorisant


Représentant de l’industrie pharmaceutique, le délégué ou visiteur médical fait le lien avec les professionnels de santé, particulièrement les médecins pour les informer,  promouvoir et développer la vente des produits du laboratoire pour lequel il travaille. Aujourd’hui, la Tunisie compte plus  de 4.000 délégués médicaux présents sur tout le territoire national, de Bizerte à Mednine.
Normalement, et comme cela se passe au niveau de plusieurs pays européens, l’accès au métier du délégué médical requiert un niveau de formation supérieure scientifique (C’est un arrêté du ministre de la santé publique du 28 mai 2001 qui fixe les modalités d’accès à la profession et son mode d’organisation. Il est nécessaire d’être titulaire d’un diplôme attestant de deux années d’études médicales, pharmaceutiques, dentaires ou vétérinaires ou bien d’un diplôme reconnu équivalent.
Cependant la majorité des visiteurs médicaux en Tunisie sont médecins car ils font des staffs et présentent les études du produit de manière détaillée.). Chez nous, ce n’est pas une règle générale, bien que cette condition soit aujourd’hui exigée dans la plupart des cas par des laboratoires nationaux et internationaux.
Les écoles privées qui ont développé cette formation ne sont pas nombreuses . Il s’agit d’un enseignement intensif, le plus souvent sur une courte durée . Cet enseignement s’articule autour de deux parties : la première est théorique, la seconde consiste en un stage pratique d’une durée d’un mois sur le terrain (hôpitaux – cabinets  – pharmacies…). L’objectif est de former des candidats capables d’assurer auprès des médecins prescripteurs, la promotion et le bon usage des médicaments fabriqués par le laboratoire qui les emploie ou qu’ils représentent.
Aujourd’hui, plusieurs voix s’élèvent concernant la formation des délégués médicaux qui pose problème selon les dires de nombreux membres des différentes associations des délégués médicaux. Ces derniers souhaiteraient que cette formation soit dispensée au sein d’établissements universitaires afin qu’elle soit en adéquation avec les exigences du métier.

Un métier rebutant
A l’hôpital ou au cabinet, le délégué médical c’est le jeune homme rasé habillé en costume, chemise et cravate et qui porte un cartable, qui souvent attend d’être reçu par le médecin. Son métier l’oblige à porter plusieurs casquettes. C’est  tour à tour un scientifique qui maîtrise l’anatomie du corps humain, la  physiologie et qui connait certaines pathologies et surtout les différents traitements.
Au – delà de cet aspect, le visiteur médical est un redoutable spécialiste du marketing, un vendeur  qui cherche toujours à réaliser un chiffre d’affaire selon l’objectif communiqué par la direction du laboratoire qu’il représente. Pour cela, il faut apprendre coûte que coûte  à vendre les produits. Pour Naoufel Masri, un vieux routier dans le domaine de la délégation médicale (15 ans de métier), le visiteur médical est un homme orchestre, tour à tour, il est détective privé, car son objectif est de faire remonter toutes les informations terrain: température de l’activité, prescriptions, concurrence, mise en place, actions, tables rondes…
C’est aussi un psychologue : car il faut de temps en temps absorber la rage des médecins et essayer de les calmer et comprendre ce qui se passe pour quelque chose que vous n’avez même pas fait.
Le délégué médical est un livreur : car parfois  il est obligé de récupérer de gros cartons et de livrer des gadgets, du matériel informatique ou du matériel médical. C’est un chauffeur de taxi. En ville, il est obligé de connaitre toutes les ruelles ; son métier nécessite de faire  des déplacements au moins une semaine par mois. Certains délégués médicaux sillonnent en voiture plusieurs régions du Maroc avec tout ce que cela signifie comme risques.
Dès lors, on devine que c’est  un métier fatiguant, difficile,  stressant, éreintant, qui nécessite des nerfs solides, une grande patience. En plus de tout cela, le délégué médical doit rédiger des rapports journaliers et hebdomadaires et le plus important, il ne faut jamais écrire RAS (rien à signaler). Il faut savoir ressortir les belles phrases sans faire de mal à personne. Et c’est comme ça qu’on devient aussi un bon écrivain.

Un quota de médecins à visiter par jour
Pour mener à bien sa mission et assurer les objectifs tracés par le chef produits ou le  superviseur, le délégué médical entreprend parfois une véritable course contre la montre, car il doit rendre visite chaque jour à plus de 10  médecins : entre ceux qui travaillent  au niveau des hôpitaux publics ou ceux installés dans le secteur privé. Le délégué médical doit faire preuve de beaucoup de patience et se plier aux horaires des médecins prescripteurs.
Faire la promotion des produits médicamenteux auprès des médecins n’est pas chose aisée. Le délégué médical doit avoir une bonne connaissance des médicaments, de leurs interactions et de leurs effets secondaires. C’est un élément impératif pour  mériter la confiance des médecins et réussir dans le métier.
A cet effet, il est utile de rappeler ici que la visite des médecins prescripteurs vise aussi à recueillir toutes informations médicales susceptibles de promouvoir les produits du laboratoire et de renforcer les liens entre les différentes parties pour l’intérêt des malades.
Le délégué médical assure un rôle essentiel dans ce sens. Il est la courroie de transmission entre les praticiens et les laboratoires. Une fois par semaine, le délégué médical est tenu de soumettre à son superviseur (chef hiérarchique), un bilan de sa semaine de travail avec les détails sur les visites, les remarques des médecins et les problèmes rencontrés. Toutes ces informations sont extrêmement précieuses pour le laboratoire car elles permettent de connaître les besoins des médecins et de tenter d’y répondre par des ajustements au niveau de l’offre.
Éthique et Déontologie
Certains laboratoires de produits médicamenteux entreprennent sans cesse des actions marketing énergiques auprès des médecins. L’objectif étant d’orienter, de pousser, d’encourager les médecins à prescrire tel ou tel médicament, surtout auprès des médecins qui entretiennent des liens étroits avec certains laboratoires. A l’évidence, et par la force des choses, ces relations étroites sont parfois plus qu’ambiguës et prêtent à confusion.

Il n’est un secret pour personne que de dire que plusieurs laboratoires de produits pharmaceutiques financent des déplacements et séjours dans des hôtels pour permettre à certains médecins d’assister à des congrès médicaux. On devine aisément que ces mêmes médecins finissent par perdre quelque peu leur indépendance en entretenant des relations opaques avec ces laboratoires, fort heureusement que ces médecins représentent une petite minorité. Le comportement et les agissements de certains délégués médicaux portent aussi sérieusement atteinte à cette profession qui voit son image écornée.
L’association des délégués médicaux Tunisie avait tenu une réunion le 5 Novembre 2017.  «Notre métier connaît de plus en plus de dépassements, notamment en ce qui concerne le non-respect de l’éthique et de la déontologie qui régissent notre profession, en plus de certains dysfonctionnements en termes de diffusion de l’information à destination des médecins et pharmaciens pour une bonne prescription médicale», s’était insurgé Masri Naoufel, président de l’ADMT. Une charte d’éthique et de déontologie a été instaurée pour mettre fin aux mauvaises pratiques de la visite médicale.
Des salaires attractifs
Près de 4.000 délégués sillonnent chaque jour la Tunisie. Ils sont considérés à juste titre comme la force de frappe des laboratoires pharmaceutiques. Exerçant une activité mi-médicale, mi-commerciale, les délégués médicaux gagnent en général assez bien leur vie. En effet, c’est un métier gratifiant sur le plan salarial, qui permet au visiteur médical de  profiter de deux facteurs essentiels : la rémunération des postes ayant un profil commercial souvent constituée d’un fixe (qui débute par 1.500 Dinars) auquel  viennent s’ajouter des primes établies en fonction des quantités et des produits vendus. Ce métier jouit également de la bonne santé du secteur pharmaceutique. Le salaire d’un délégué pharmaceutique peut donc atteindre facilement 3.000 Dinars / mois, et même plus. Il  est souvent valorisé par une participation sous forme d’intéressement au chiffre d’affaires du laboratoire. Le délégué pharmaceutique perçoit souvent cette prime collective, les laboratoires pharmaceutiques étant souvent en bonne santé financière au même titre que le secteur dans son ensemble. Et à ce salaire intéressant s’ajoutent des avantages en nature qui permettent au délégué pharmaceutique de bénéficier d’un cadre de travail et de vie agréable.